- En
observant le bas de cette fresque l'on aperçoit le navire amiral
de la flotte portugaise, la Nossa
Senhora do Cabo portant les couleurs
du Portugal de retour d'un voyage des Indes Orientales. Nous
comprîmes
que les pirates avaient un grand intérêt à
caréner et réparer l’armement de ce navire imposant, une
véritable arme d'attaque auprès des Indiamen, des navires
marchands faiblement armés.
- Nous
avons retenu le nom de la Nossa
Senhora do Cabo comme piste principale
à suivre et ceci afin de remonter sur les traces du pirates
Olivier Levasseur. Cependant le brouillage des pistes est
facilité par le fait que les pirates abandonnaient ou
brûlaient souvent leur navire pour un meilleur parmi leurs proies
et rebaptisaient le nouveau navire de l'ancien nom. Ainsi,
accrochez-vous, - dit Verrazone avec un léger sourire -, le
Peterborough of Bristol devint le Victory appartenant au pirate
anglais
John Taylor. Il fut ensuite abandonné à Madagascar en
1721. La Nossa Senhora do Cabo
devint ensuite le Victorieux appartenant
au pirate français Olivier Levasseur. La piste à suivre
est bien celle de la Nossa Senhora do Cabo, en direction de
Sainte-Marie, après l'abordage du Ville d'Ostende le 26 Avril
1721. La trace suivante laissée par la Nossa Senhora do Cabo fut
l'attaque de la Duchesse de Noailles,
un bateau de la Compagnie des
Indes Françaises au mois de décembre 1721 dans le canal
du Mozambique.
Les
registres maritimes de Lorient confirmèrent à Verrazone
l'attaque
de la Duchesse
de Noailles
en décembre 1721 par le pirate Olivier Levasseur. La Duchesse
de Noailles
était un navire de la Compagnie des Indes Française,
réarmé à
Lorient le 15 juin 1720. Ce navire de cent-quatre-vingt tonneaux et
seize canons était à destination de Madagascar.
- La Duchesse de Noailles
était pilotée par le capitaine Plattel et parmi
l'équipage, on comptait un passager et deux soldats. Le bateau
fut pris par des pirates en 1721 et c'est le passager, un
écrivain qui dressa les détails de la prise : "le bateau
fut pillé sans vergogne mais avec grande déception. En
effet le chargement constitué essentiellement de vivres
à destination de l'isle de Bourbon ne satisfit pas
l'appétit d'or des pirates, ils incendièrent notre navire
en prenant à leur bord une partie des vivres frais afin de
lutter contre le scorbut. Certains membres de l'équipage ayant
de quoi payer leur voyage de retour furent embarqués et
jetés à la mer peu après. ". Les recherches
historiques devinrent très
intéressantes. Nous avons établi grâce à des
récits de voyage que la Ville
d’Ostende fut envoyée
à destination de Madagascar avec à son bord des pirates
et des prisonniers militaires portugais du Vice-Roi de Goa afin de
faire préparer des mâts pour la Nossa Senhora do Cabo.
Deux cents esclaves et la Ville d’Ostende serviraient de monnaie
d'échange. Le voyage de la
Ville d’Ostende ne se termina pas
comme prévu, les pirates malades furent renversés par les
prisonniers portugais et s'échappèrent dans la Baie de
Saint Augustin au Sud-Ouest de Madagascar. Pendant ce temps, Taylor et
Levasseur mirent le cap sur la baie de Saint Augustin pour rejoindre la
Ville d’Ostende. C’est à cet endroit que les pirates
partagèrent leur butin. Une fois le partage effectué, les
pirates procédèrent à la remise en forme de la Nossa Senhora do Cabo,
un carénage refait à neuf avec les
canons du Victorieux et des
autres navires capturés. Les
charpentiers fabriquèrent des nouveaux mâts et le
gouvernail fut changé. Le Victorieux,
l'ex Peterborough of
Bristol fut dès lors brûlé en baie de Saint
Augustin où son épave gît encore. La Nossa Senhora
do Cabo fut alors renommée Victorieux par Olivier Levasseur !

Itinéraire
probable du pirate après la l'attaque de la Nossa Senhora do
Cabo.
Carte
du Congo et du Pays des Cafres. Par G. De L'ISLE de l'Académie
Royale des Sciences. 1708
La
construction aussi imposante du navire permit de suivre la piste du
voyage du Victorieux,
l'ex-Nossa
Senhora do Cabo. Verrazone rechercha les récits
historiques
relatant les
péripéties des
pirates au grès des différents mouillages qu’ont pu
effectuer
Levasseur et Taylor.
L’indice
historique suivant amena les auditeurs en avril 1722 sur la côte
de
Monomotapa, dans la Baie de Delagoa encore appelée la baie de la
Rivière Saint-Esprit. Cette fois Ritchi Baneto pris la parole et
raconta alors les aventures des deux pirates vers la ville
appelée
Lourenço Marques par les
portugais puis rebaptisée Mapoto depuis 1975.
- L'hydrographe
Hollandais Jacob
de Bucquoy raconte dans un ouvrage que le Victorieux et la Cassandra mouillant de nuit en
baie de Delagoa furent surpris
au petit matin par
des coups de canons venant du fortin Lijdzaamheid fabriqué la
semaine précédente par la Compagnie des Indes
Hollandaise. La Cassandra et
le Victorieux ne firent
qu’une
bouchée du fort vu le nombre de canons à bord des deux
navires et des quatre cents hommes regroupés sur les deux
navires pirates. Les pirates restèrent dans ce fort pour y vivre
du mois d'avril au mois d'août 1722. Le quartier-maître
Taylor fit des confidences à Jacob de Bucquoy au sujet de la
prise faite à l'Isle de Bourbon, un butin appartenant au
Vice-Roi de Goa et à des prêtres pour un montant
équivalant à dix millions d'euros actuels, en diamants,
or, argent monnayé, en barres ou en lingots. Après avoir
vécu quelque temps dans ce fort, Taylor et Levasseur se
séparèrent. Taylor prit la Routes des Indes de l'Ouest
à bord du Cassandra qui
fut renommée pour l'occasion La
Défense ou La
Fantaisie suivant les récits. Pendant ce
temps, Levasseur et son équipage devenus riches mirent le cap
vers Madagascar à bord du Victorieux.
Levasseur eut écho
que les courses lancées contre les pirates avaient amené
le Commodore Anglais Matthews à Fort Dauphin sur la côte
Est de Madagascar.
- C'est à
partir de ce
moment que nous émettons des doutes sur l'itinéraire
qu'on suivi les pirates glissa Verrazone.
- En effet reprit Baneto, Olivier
Levasseur décida probablement de mettre le cap à
Sainte-Marie l'île des Forbans. Le pirate et son équipage
mouillèrent dans la partie occidentale de l'île, dans une
baie protégée des vents, appelée
communément la Baie des Forbans. Ce lieu de mouillage est
aujourd'hui nommé Ambodifototra.
- Cela sera notre point de
départ pour les fouilles que nous mèneront de juin
à septembre lança enthousiaste Francesca.
Ritchi
Baneto appuya l'enthousiasme de Francesca par une description des
lieux des fouilles.
-
La
baie au fond sablonneux d'Ambodifototra était d'un accès
aisé de par les alizés toujours présents. Le fond
sablonneux de quinze brasses environ permit le mouillage du Victorieux dans de bonnes
conditions. La première
spécialité
de Sainte-Marie au XVIIIème siècle était la
culture du riz pour laquelle de nombreux navires de ravitaillement
venaient faire le plein. La deuxième spécialité
était la piraterie, le repère de tous les forbans
croisant en Mer du Sud, et surtout dans les Mascareignes. Une fois pris
leur butin, les pirates allaient le dépenser sur les
différentes îles des Mascareignes. Sainte-Marie devint un
véritable repère de pirates et plusieurs mirent là
leur butin de côté.
La
conférence de Francesca Verrazone et de Ritchi Baneto s'acheva
par
le retour des questions.
-
Pour
en revenir à ma question précédente Melle
Verazonne, repris Tomaso Casavalle, propriétaire de plusieurs
journaux dont la Revue d'Archeologie
où publie Francesca, nous
ne voyons pas beaucoup d'éléments concrets permettant
l'identification formelle de l'épave de Sainte-Marie de
Madagascar comme étant celle de la Nossa Senhora do Cabo.
- Et bien, comme
vous le savez, nous avons
retracé historiquement les
déplacements et rencontres que la Nossa Senhora do Cabo a pu
faire avant de s'échouer, nous avons déterminé un
lieu en l'ilet de Sainte-Marie comme le lieu le plus probable du lieu
d'échouage.
- Quelles
pièces de valeurs historiques pensez vous trouver lors de ses
fouilles ?
- D'après le registre du
port de Goa, la Nossa Senhora do Cabo
transportait pour environ
trois-cent-soixante-quinze mille livres sterling de marchandises
précieuses, or et diamants travaillés ou bruts. Les
pirates se partageant le butin reçurent chacun quatre mille
livres et quarante-deux diamants. Un fameux diamant de 426 carats brut,
jadis découvert en 1698 dans la mine de Partoul au royaume de
Golkonda dans l'Andhra Pradesh, en Inde du sud aurait été
embarqué en 1721 sur la Nossa
Senhora do Cabo au Comptoir
Portugais de Goa. Ce diamant surpassait en beauté et en poids
tous les diamants jusqu'alors connus en Occident, il était une
pièce unique dans le monde et de valeur inestimable, son prix
aurait rendu ce diamant inaccessible à la couronne de France.
- Les yeux de Tomaso Casavalle
pétillaient devant les dollars qui commençaient à
s'afficher dans ses yeux.
- Nous avons reçu
l'année dernière de votre confrère Ritchie Baneto
une pièce de bois prélevée sur les lieux de
fouilles, celle-ci ne semble pas indiquer par sa datation qu'il puisse
s'agir de l'épave de la Nossa
Senhora do Cabo, êtes vous
sûr d'avoir localisé à Saint-Marie la bonne
épave ?
La
réponse définitive arriva de Giuseppe Verrazone prenant
la défense de sa fille:
- La
determination du Terminus Post quem se fera à partir de
l'ensemble des éléments que nous
prélèverons sur place, nous comptons trouver des
pièces de monnaie et porcelaines. Le mobilier
archéologique nous confirmera ou pas de la nature et l'origine
de cette épave.
La
réponse technique coupa la verve de Tomaso
Casavalle.
Giuseppe
Verrazone connaissait bien le personnage depuis le temps, plus
obsédé par l'argent que par les considérations
archéologiques, le directeur des fouilles
étaient soumis
à la pression de certaines sociétés privées
d'exploitation
sous-marines qui s'affranchissaient de permis et autorisation pour
remonter des pièces archéologiques. Giuseppe
Verrazone ne supportait pas ces mentalités perverties et
continuer de se
battre pour préserver l'intérêt scientifique et
historique des
missions d'explorations.
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